Conférence « Remasters. Restauration et optimisation des œuvres phonographiques rock » par Pierre Arnoux, Sorbonne Université, 15h00 à 17h00, au centre Clignancourt.
Dans le cadre du cours « Analyse des musiques populaires enregistrées » d’Olivier Julien.
« La réédition d’œuvres phonographiques rock constitue aujourd’hui une pratique courante de l’industrie musicale. On peut y déceler une double logique d’exhaustivité et d’optimisation : exhaustivité des versions (inédits, démos, versions préparatoires ou abandonnées, versions de concert, remixes, etc.) et optimisation des titres déjà publiés, notamment par la pratique du remastering. Outre ses attendus économiques et sociaux, cette pratique pose toutefois deux problèmes connexes. D’une part, un problème ontologique, qui porte sur la nature de ces œuvres un temps identifiées à une unique séquence enregistrée ; d’autre part, un problème esthétique, dans la mesure où ces versions remastérisées sont souvent présentées comme supérieures aux versions originales, tout en étant soupçonnées de n’être que des concessions aux modes sonores du jour. Le remastering et l’ensemble des processus de restauration et d’optimisation sonores renvoient ce faisant à une interrogation centrale dans d’autres arts, suscitée par des pratiques de conservation et de restauration apparemment analogues : peut-on restaurer l’œuvre dans son essence en essayant de remédier aux effets du temps, qui l’altère inexorablement, ou bien cette altération doit-elle être considérée comme constitutive de l’œuvre, son existence esthétique étant indissociable de son existence historique ? Le cas des œuvres phonographiques rock offre de fait la possibilité d’échapper à cette alternative, en raison de spécificités qu’une approche pragmatiste, attentive aux technologies autant qu’aux discours déployés, peut permettre de cerner au plus près. »