La critique musicale : de la théorie à la pratique.
Compte rendu de la journée d’étude,
13 mars 2015, Faculté de musique,
Université de Montréal, salle Serge-Garant
Margalida Amengual Garí, Hubert Bolduc-Cloutier,
Chloé Huvet et Marie-Pier Leduc
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Résumé
La journée d’étude La critique musicale. De la théorie à la pratique organisée par l’Observatoire interdisciplinaire de création et de recherche en musique (OICRM) s’est déroulée le 13 mars 2015 à la Faculté de musique de l’Université de Montréal. Six conférenciers (Michel Duchesneau, Valérie Dufour, Marie-Thérèse Lefebvre, Emmanuel Reibel, Pascal Lécroart et Timothée Picard) y ont présenté les résultats de leurs recherches sur la critique musicale en pays francophones. Ce texte, qui consiste en un compte rendu critique de cette journée d’étude, se concentre autour de trois axes de réflexion : 1) théorisation et pratique de la critique musicale ; 2) critique musicale et statut socioprofessionnel des critiques ; 3) critique musicale et individualisme méthodologique.
Mots clés : critique musicale ; France ; presse musicale ; Québec ; XXe siècle.
Abstract
Organized by the Observatoire interdisciplinaire de création et de recherche en musique (OICRM), the study day La critique musicale. De la théorie à la pratique (Music Criticism. From Theory to Practice) took place on March 13, 2015, at the Faculty of Music of the University of Montreal. Six lecturers (Michel Duchesneau, Valérie Dufour, Marie-Thérèse Lefebvre, Emmanuel Reibel, Pascal Lécroart and Timothée Picard) presented the results of their research on music criticism in French-speaking countries. The present article is a critical report of the study day, and is articulated around three main topics: 1) theorization and practice of music criticism; 2) music criticism and the socio-professional status of critics; 3) music criticism and methodological individualism.
Keywords: music criticism; France; music press; Quebec; 20th century.
Explorer les liens entre les discours théoriques, esthétiques et philosophiques sur la critique musicale et la pratique même de cette critique en France et au Québec à la fin du XIXe siècle et la première moitié du XXe siècle, tel était l’objectif de la journée d’étude La critique musicale. De la théorie à la pratique présentée et organisée par l’Équipe « Musique en France aux XIXe et XXe siècles. Discours et idéologies » (ÉMF) de l’Observatoire interdisciplinaire de création et de recherche en musique (OICRM) le 13 mars 2015 à la Faculté de musique de l’Université de Montréal. La musicologie contemporaine, notamment dans le milieu francophone, connaît un engouement pour les travaux qui s’intéressent à la presse et à la critique musicale ainsi qu’aux écrits d’artistes. Cette tendance se voit confirmée par les nombreux projets de recherche en cours1Nous pensons aux projets de l’ÉMF de l’OICRM La presse musicale en France (1890-1940). Discours et idéologies et Esthétique musicale en France entre 1900-1950 dirigés par Michel Duchesneau, aux divers projets du Collectif de Recherche sur la Presse Musicale Française de l’Institut de recherche en musicologie (IReMus) et au projet Francophone Music Criticism (1789-1914) dirigé par Barbara L. Kelly et Mark Everist à l’Institute of Musical Research (IMR) de l’Université de Londres. La présente journée d’étude s’inscrivait dans le cadre du programme La critique musicale au XXe siècle dirigé par Timothée Picard à l’Institut universitaire de France (IUF ; voir en … Continue reading et les multiples publications récentes2Parmi les ouvrages récents qui traitent de ces questions de façon panoramique, mentionnons, par exemple : Duchesneau, Dufour et Benoit-Otis 2013 ; Brogniez et Dufour (à paraître) ; Kelly et Moore (à paraître). Pour ce qui est des publications portant sur des figures spécifiques de critiques musicaux, citons l’édition des écrits de Boris de Schlœzer établie et présentée par Timothée Picard (2011) et l’ouvrage d’Emmanuel Reibel (2005) sur la critique musicale d’Hector Berlioz. qui portent sur le sujet. Pour la présente journée d’étude, six conférenciers provenant du Québec, de la France et de la Belgique ont été invités à partager les résultats de leurs recherches sur cet enjeu de la théorie et de la pratique dans la critique musicale (voir le programme reproduit ci-dessous). Trois principaux axes de réflexion se dégagent de cette journée, correspondant aux questions annoncées dans le programme auxquelles les intervenants ont cherché à répondre : « En quoi la réflexion théorique oriente-t-elle la critique ? », « Dans quelles mesures les principes énoncés sont-ils ou peuvent-ils être appliqués en fonction du statut professionnel du critique ? » et « Peut-on parler d’individualisme méthodologique à propos de la pratique de la critique musicale ? ».
Michel Duchesneau (Université de Montréal/OICRM) « De quelques fondements musicologiques de la critique musicale. Le rapport temporel à l’œuvre d’après Lionel Dauriac et Romain Rolland » Valérie Dufour (Université libre de Bruxelles/FNRS) « Les coulisses de la critique, ou comment devenir critique (et le rester) sous la Troisième République ? » Marie-Thérèse Lefebvre (Université de Montréal/CRILCQ) « Discours des chroniqueurs francophones et anglophones à propos des œuvres nouvelles dans la presse québécoise (1919-1949). Les limites que la formation musicale impose à l’exercice de la critique » Emmanuel Reibel (Université Paris Ouest - Nanterre La Défense) « Théorie et pratique de la critique. L’exemple de Jean d’Udine au Courrier musical » Pascal Lécroart (Université de Franche-Comté) « Arthur Honegger, critique de Comœdia. Une “propagande” esthétique ou idéologique ? » Timothée Picard (Université Rennes 2) « La chronique “La musique et les lettres” d’André Cœuroy. Mise à mort d’une méthode et d’un objet critiques par son promoteur même » |
Programme de la journée d’étude La critique musicale. De la théorie à la pratique (13 mars 2015, Faculté de musique, Université de Montréal). Affiche.
Axe 1 : théorisation et pratique de la critique musicale
La réflexion métacritique s’est avérée une thématique importante de la journée d’étude. Michel Duchesneau, Emmanuel Reibel et Timothée Picard ont ainsi questionné la manière dont le discours théorique s’articule avec la pratique de la critique musicale. Reibel en proposait un éclairage intéressant à propos du critique du Courrier musical Jean d’Udine (pseudonyme d’Albert Cozanet, 1870-1938). À travers cette étude de cas, il s’agissait également de nuancer le discours dominant, qui en a fait un adepte de la critique subjective3Frédéric Hellouin classe d’Udine du côté des « littérateurs – musiciens intuitifs » dans son Essai de critique de la critique musicale (Hellouin 1906, p. 143 et 178-181). Cette étiquette a probablement été renforcée en raison des positions esthétiques du critique. En effet, d’Udine défend les valeurs de simplicité et de clarté, caractéristiques de la musique française qu’il ne retrouve pas chez Debussy. Cela lui a valu de voir ses positions caricaturées par de nombreux debussystes. Reibel insiste au contraire sur les connaissances et les compétences musicales de d’Udine, qui a d’ailleurs composé quelques pièces.. Cette vision est simplificatrice selon Reibel, dans la mesure où d’Udine renvoie dos à dos la critique savante (pour sa sécheresse) et celle des littéraires (pour sa subjectivité), en stigmatisant à la fois le snobisme et le dogmatisme.
Extrait vidéo 1 : Emmanuel Reibel sur le premier article de Jean d’Udine dans le Courrier musical (3 décembre 1899).
À la faveur de la polémique l’opposant à Lionel de la Laurencie (1861-1933), d’Udine propose une troisième voie qui consisterait en une objectivation des impressions personnelles. Il publie alors un roman-feuilleton (Dissonance, roman musical) dans les pages du Courrier musical où il met en scène l’évolution du goût musical, qui se fait à l’échelle individuelle et collective. Par le biais de la veine romanesque, d’Udine promeut son idéal critique où deux leçons se dessinent : l’éclectisme et la relativité des sensations, des goûts et du Beau. Critiqué et réduit péjorativement à un simple littérateur, il déploie deux stratégies pour se défendre : il théorise scientifiquement sa pratique et feint l’abandon de la critique. Ses comptes rendus de concerts changent alors de forme et se présentent comme des « lettres à une dame imaginaire ». Reibel propose plutôt d’envisager sa critique comme une possible « école des amateurs4Le terme est employé par d’Udine lui-même (voir d’Udine 1905a et 1905b). », où nul principe esthétique ne saurait avoir valeur de loi absolue.
Ces prises de position, jalonnant l’ensemble des débats dans la presse aux XIXe et XXe siècles, interrogent la définition même de la critique musicale et les objectifs qu’on lui assigne. Duchesneau a démontré qu’une scission s’opère entre la conception de la critique, d’une part comme expression d’impressions subjectives et, d’autre part, comme une science objective, et que cette scission est intimement liée à la question de la temporalité dans l’exercice de la critique. De manière récurrente, les partisans d’une critique objective, conçue comme un outil de connaissance et de diffusion du savoir auprès du public, regrettent l’intervalle relativement court qui s’écoule entre l’audition de l’œuvre et la rédaction de l’article.
Extrait vidéo 2 : Michel Duchesneau cite le critique musical Arthur Pougin (« Enquête sur la critique dramatique française », Revue d’art dramatique, 1899).
Se pose ainsi la question de la temporalité du discours qui, comme l’a rappelé Duchesneau, a été l’objet de nombreux débats : ce court laps de temps est-il garant d’une critique de qualité, qui rendrait justice à l’œuvre ?
Le conférencier prend pour point de départ l’« Enquête sur la critique dramatique française » lancée par la Revue d’art dramatique en 1899.
Extrait vidéo 3 : Michel Duchesneau à propos de l’« Enquête sur la critique dramatique française » (Revue d’art dramatique, 1899).
Plusieurs acteurs importants de la vie musicale s’y sont exprimés. D’un côté, certains pensent qu’une critique demande plusieurs auditions de l’œuvre et une étude approfondie de la partition. Le compositeur Georges Hüe (1858-1948), par exemple, estime préférable de disposer de plusieurs jours de réflexion : la rédaction de la critique immédiatement après le concert est lacunaire et insuffisamment représentative de l’œuvre entendue. Ce dernier juge même que « les comptes rendus du lendemain » sont « souvent dangereux » (Hüe 1899, p. 178). De l’autre côté, une partie des critiques conçoit favorablement les articles rapportant les premières impressions ressenties lors de l’audition d’une œuvre. Alfred Bruneau (1857-1934) trouve ainsi une force particulière au « feuilleton du lendemain », dont les impressions personnelles donnent une idée nette de l’œuvre au lecteur. Cet argument s’inscrit pleinement dans sa conception de la critique musicale qui doit, selon lui, fournir une « appréciation documentée » et « une discussion motivée, quoique immédiatement engagée » (Bruneau 1899, p. 169). D’autres encore, comme le compositeur et chef d’orchestre Louis-Albert Bourgault-Ducoudray (1840-1910), estiment que les textes sur une œuvre peuvent paraître au lendemain de sa première exécution, s’ils se contentent d’être des comptes rendus ; les critiques, quant à elles, nécessitent un temps de réflexion pour « éclairer le public et rectifier son jugement » (Bourgault-Ducoudray 1899, p. 181).
Le philosophe et professeur d’esthétique musicale Lionel Dauriac (1847-1923) ainsi que Romain Rolland (1866-1944), penseurs incontournables de la musique au tournant du XXe siècle, expriment des idées similaires à celles de Bourgault-Ducoudray en déplaçant leur problématique à un autre objet : l’étude musicographique. Ils militent en effet pour une approche approfondie des œuvres, adossée aux partitions. La critique musicale devient alors prétexte à dresser le portrait psychologique du compositeur et à contextualiser son parcours, ainsi qu’à disserter sur l’évolution stylistique des genres et sur les transformations du langage musical. L’exercice de cette forme de critique, telle que pratiquée dans les pages de la Revue d’histoire et de critique musicales fondée en 1901 et dont Rolland fut l’un des principaux instigateurs, devient ainsi étude historique5Cette conception de la critique musicale trouvera écho dans les années 1920 avec la fondation de La Revue musicale d’Henry Prunières, comme le remarquera Fernand-Georges Roquebrune (pseudonyme de Georges-Auguste Arbelot) : « L’antique Revue musicale, dirigée autrefois par M. Combarieu, puis par M. Écorcheville, est reprise par M. Henry Prunières, n’en doutons pas, dans le même esprit qui avait présidé à sa fondation : respect des grandes traditions de la critique musicale, prédilection pour les belles recherches musicologiques, pour les patients problèmes de l’histoire de la musique, étude attentive mais prudente des courants nouveaux » (Roquebrune 1920, … Continue reading. Pour Dauriac et Rolland, le temps de la critique serait devenu celui de la réflexion musicographique ; c’est pour cette raison que Duchesneau voit dans la position des deux hommes les germes d’une musicologie critique en France.
La prise de position des critiques selon une approche subjective – associée à une conception littéraire du discours sur la musique – ou objective – liée à une optique plus technique – est, d’une façon générale, exposée au sein de leur première chronique qui prend ainsi une valeur programmatique et annonce la couleur de la plume de l’auteur. Toutefois, l’orientation du discours critique ne constitue pas une réalité immuable. Plusieurs enjeux se dégagent des différentes communications présentées au cours de la journée d’étude concernant cette fluctuation des positions des critiques de la musique. Le renversement de la conception d’André Cœuroy (pseudonyme de Jean Belime, 1891-1976) vis-à-vis des possibilités de rendre compte des liens entre musique et littérature, relaté par Picard dans sa conférence, est représentatif de ce phénomène. Le corpus étudié rassemble les textes de Cœuroy publiés dans les pages de La Revue musicale entre 1921 et 1932, période sur laquelle s’échelonne le changement progressif de l’attitude de l’auteur. De fait, prônant d’abord une approche poético-littéraire teintée par l’héritage du romantisme allemand, Cœuroy s’éloigne de cette conception au milieu des années 1920 pour se tourner vers une écriture plus objective, telle qu’incarnée dans son article « La musique, vice littéraire » publié en deux parties (Cœuroy 1925 et 1926).
Extrait vidéo 4 : Thimothée Picard sur « La musique, vice littéraire » d’André Cœuroy (La Revue musicale, vol. 7, 1925, et vol. 9, 1926).
Le néoclassicisme stravinskien constitue un agent particulièrement prégnant dans l’évolution de la pensée de Cœuroy : en parallèle aux considérations sur cette musique dite « pure », Cœuroy entreprend l’écriture d’une critique davantage marquée par le discours technique, puisque le discours littéraire n’est plus à même de livrer l’essence d’une musique débarrassée de son expressivité romantique. Ainsi, il prend un tournant radical contre l’idéal de l’union musico-littéraire annoncé dans le programme initial de sa chronique « La musique et les lettres », ne représentant désormais pour lui qu’une forme de verbalisme renvoyant à un épanchement lyrique des auteurs.
Dans ces trois conférences, le lien entre théorie et pratique de la critique musicale est ainsi présenté selon une double perspective : d’une part, la théorie en amont de la pratique et, d’autre part, la pratique comme espace de réflexion théorique. Par ailleurs, rappelons que la position théorique du critique ne s’exprime pas uniquement d’un point de vue métacritique, mais également par le biais de la forme discursive empruntée. À titre d’exemple, certains critiques, tels Arthur Honegger (1892-1955) ou Jean d’Udine, n’insèrent que peu ou pas d’exemples musicaux ou d’extraits de partitions pour illustrer leur discours. D’autres, à l’inverse, vont présenter des schémas d’analyse détaillés, à l’instar des écrits de Louis Laloy (1874-1944) pour la Revue d’histoire et de critique musicales. Parmi les autres indicateurs de la position théorique du critique, on peut également compter le style (pédagogique, littéraire, intuitif, etc.), le contenu (sujets favorisés) de même que l’organe de presse dans lequel publie le critique.
Axe 2 : critique musicale et statut socioprofessionnel des critiques
L’étude de la pratique de la critique musicale repose généralement sur l’analyse d’un corpus de textes qui est alors souvent confronté à des écrits théoriques – la pratique est à ce moment entendue comme résultat d’une production. Mais cette étude de la pratique peut également être envisagée comme examen du « monde » de la critique musicale – la pratique est alors considérée comme réalité sociale en amont de la production. C’est cette deuxième approche qu’ont adoptée Valérie Dufour et Marie-Thérèse Lefebvre.
Dans sa communication, Dufour a présenté les résultats d’une recherche en cours d’ordre sociomusicologique qui s’intéresse d’un point de vue macroscopique aux profils socioprofessionnels des critiques musicaux français de la fin du XIXe et de la première moitié du XXe siècle ainsi qu’à leur organisation collective à travers l’Association des professionnels de la critique dramatique et musicale (APCDM)6Fondée en 1899, l’APCDM est issue du Cercle de la critique dramatique et musicale qui avait été formé en 1877. Lorsqu’elle est reconnue légalement en 1902, l’APCDM adopte le nom d’Association syndicale professionnelle et mutuelle de la critique dramatique et musicale (ASPMCDM), bien que souvent simplement appelée Association de la critique dramatique et musicale. En 1960, l’association devient le Syndicat professionnel de la critique dramatique et musicale, puis, en 2002, le Syndicat professionnel de la critique de théâtre, de musique et de danse. L’association existe toujours aujourd’hui, mais sous le nom d’Association professionnelle de la critique théâtre, … Continue reading. L’enquête sur les profils socioprofessionnels de Dufour s’est effectuée d’après un échantillon de 100 critiques musicaux actifs entre 1870 et 1940 au sein de 35 quotidiens nationaux7Les 35 quotidiens sélectionnés pour l’enquête ont été consultés dans Gallica, la bibliothèque numérique de la Bibliothèque nationale de France (BnF). et présentant une activité continue d’au moins deux années consécutives. Il ressort de cette analyse que les critiques musicaux de l’époque appartiennent à deux champs professionnels dominants, soit celui de la musique et celui des lettres : 39% des critiques sont des compositeurs qui correspondent à la figure du compositeur-critique (ou de critique-compositeur) et 38% sont des hommes de lettres (musicographes, auteurs, journalistes, etc.). Les liens entre le monde de la critique musicale et celui des beaux-arts sont, quant à eux, presque inexistants : un seul des 100 critiques de l’enquête possédait une formation dans ce domaine. Dufour a aussi consacré une partie de sa communication à l’étude des documents d’archives de l’APCDM8Les archives de l’APCDM se trouvent dans le Fonds Associations et syndicats de journalistes de l’Institut mémoire de l’édition contemporaine (IMEC) à l’abbaye d’Ardenne, Saint-Germain-la-Blanche-Herbe, France. L’Annuaire de l’Association syndicale professionnelle et mutuelle de la critique dramatique et musicale est disponible à la BnF. (actes constitutifs et procès-verbaux des congrès) qui révèlent que l’association, en plus de jouer un rôle syndical, avait le souci de créer une identité professionnelle légitimante.
Extrait vidéo 5 : Valérie Dufour résume les ambitions de l’APCDM.
De son côté, Lefebvre a présenté une étude sur le discours des chroniqueurs francophones et anglophones à propos des œuvres nouvelles, dans la presse québécoise entre 1919 et 1949, en le mettant en relation avec leur statut socioprofessionnel. La chercheuse s’est interrogée sur les origines de « l’aversion presque systématique » des médias envers une certaine forme de création musicale contemporaine de leur époque et sur les limites que la formation musicale impose à l’exercice de la critique.
Extrait vidéo 6 : Marie-Thérèse Lefebvre présente sa question de recherche.
Partant du constat que les profils socioprofessionnels des critiques musicaux actifs durant ces années présentent une grande homogénéité, notamment en ce qui a trait à leur formation, Lefebvre analyse le vocabulaire utilisé et les jugements émis par les critiques de l’époque. Elle émet l’hypothèse que l’horizon d’attente des critiques a été figé pendant leurs années de formation musicale à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, ce qui les aurait menés à rejeter les compositeurs suivant les « écoles » de l’avant-garde militante (par exemple, Maurice Ravel, Arnold Schoenberg, le Groupe des Six, voire Henry Cowell), en faveur de musiciens qu’ils jugeaient « indépendants » (par exemple, César Franck, Gabriel Fauré, Jean Sibelius et Manuel de Falla). Le goût des critiques aurait ensuite fortement influencé celui du public québécois. Ainsi, la conférence de Lefebvre offre un exemple éloquent de l’importance d’étudier où et quand la formation des critiques a eu lieu, dans la mesure où leurs conceptions esthétiques en seraient une conséquence directe.
La question du lien entre la critique musicale et le statut socioprofessionnel des critiques (ou, en d’autres mots, la question du « qui ») a non seulement été abordée par l’exploration des figures de critiques d’un point de vue sociologique, mais également par l’examen de figures spécifiques. Nous pensons, entre autres, à la conférence de Duchesneau : Rolland, exemple de critique issu de la nouvelle classe des universitaires, joue un rôle déterminant dans la création d’une revue savante (Revue d’histoire et de critique musicales) – au sens où l’entend l’historien de la presse Christophe Charle (Charle 2004, p. 169-200)9Charle propose trois catégories de revue qui prennent leur essor entre 1880 et 1914 : les grandes revues avec, par exemple, la Revue des Deux Mondes, les petites revues dont le Mercure de France est l’un des principaux représentants, et les revues savantes avec comme exemple L’Année sociologique. Cette troisième catégorie est directement liée au développement des disciplines universitaires. – en musique.
La communication de Pascal Lécroart sur la figure d’Arthur Honegger aborde également cette question. Cependant, plutôt que de chercher à éclairer la production critique du compositeur par des données socioprofessionnelles, c’est l’exploration d’un corpus (textes publiés dans le journal Comœdia sous l’Occupation) qui permet de s’interroger sur le statut d’Honegger durant ces années (compositeur ayant possiblement certaines difficultés financières pendant la guerre).
Extrait vidéo 7 : Pascal Lécroart à propos des origines du rôle de critique de Honegger.
C’est à travers ce prisme que Lécroart a abordé la délicate question de la possible compromission d’Honegger pendant l’occupation de la France par l’Allemagne nazie. Dans son premier article, Honegger annonce son programme : faire de la « propagande » au service de la musique contemporaine française (Honegger 1941, p. 1). Cette expression est évidemment lourde de sens dans le contexte de la Seconde Guerre mondiale, mais Lécroart considère que celle-ci, de même que les textes et agissements d’Honegger en général (tel le voyage à Vienne en 1941 pour le Festival Mozart organisé par Joseph Goebbels, ministre de la propagande de l’Allemagne nazie), a trop souvent été interprétée comme un signe de compromission de la part du compositeur. L’étude des textes d’Honegger révèle certains aspects de sa vision esthétique et sociale ; Lécroart décèle également un aspect politique : non-collaborateur, Honegger n’aurait pas non plus été volontairement aveugle. Le compositeur aurait bien décrypté l’utilisation politique de la musique et les intentions propagandistes du régime nazi, mais, puisqu’il croyait avant tout en l’indépendance esthétique de la musique, il aurait continué à s’exprimer favorablement sur les œuvres proposées par l’occupant tant et aussi longtemps que celles-ci revêtaient une valeur strictement esthétique à ses yeux. En conclusion, Lécroart invite la communauté musicologique à s’interroger d’un point de vue historiographique sur le traitement réservé aux compositeurs actifs sous l’Occupation. Honegger s’est-il compromis ? À la lumière des débats qui ont suivi la conférence, nous pouvons affirmer que la question est loin d’être réglée. Mais la communication de Lécroart montre l’importance de s’intéresser non seulement aux faits (écrire dans un journal approuvé par l’occupant et assister au Festival Mozart de 1941) mais également au discours (quelles sont les idées politiques, sociales et esthétiques exprimées ?) pour saisir dans toute leur complexité les dynamiques à l’œuvre dans un milieu. À cet effet, le corpus critique des différents acteurs de la vie musicale constitue une source à privilégier.
Axe 3 : critique musicale et individualisme méthodologique
Aucune conférence n’a abordé de front la question de l’individualisme méthodologique (approche en science sociale selon laquelle il est nécessaire d’analyser les individus pour comprendre les phénomènes collectifs). Celle-ci a toutefois été présente de façon implicite tout au long de la journée d’étude. En effet, par l’alternance de communications traitant aussi bien d’un cas précis que de l’évolution d’un genre ou d’une forme et présentant aussi bien des problématiques autour de figures spécifiques que des portraits sociologiques plus larges, les paradigmes scientifiques que sont l’individualisme méthodologique et l’holisme ont été abordés en filigrane. Est-il pertinent de se pencher sur des figures spécifiques de critiques, ou, au contraire, l’étude de la critique musicale doit-elle se limiter à l’examen de l’évolution de ses formes et de ses topoï ? La prise en compte de la presse musicale n’est-elle valable que pour effectuer une histoire de la réception ? Ce questionnement épistémologique est central dans la réflexion de tout musicologue s’intéressant à la presse et à la critique musicale. De cette journée d’étude, il se dégage qu’explorer la critique permet non seulement d’appréhender l’histoire de la réception – approche critiquée par Carl Dahlhaus (2013, p. 229-250) –, mais également l’histoire de la vie musicale en tant que contexte se déployant tout à la fois sur le plan sociologique, esthétique, institutionnel, relationnel, individuel, etc. En somme, l’étude de la critique musicale doit effectuer un aller-retour constant entre une approche ascendante (individualisme méthodologique) et descendante (holisme), d’où l’importance des journées d’étude comme celle du 13 mars dernier où ont été mis en commun des travaux qui portent non seulement sur divers objets, mais qui abordent également l’étude de la critique musicale selon différentes approches scientifiques.
Bibliographie
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Hellouin, Frédéric (1906), Essai de critique de la critique musicale, Paris, A. Joanin.
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Annexe
3 avril 2013. Université Paris Diderot/Paris 7, 6-7 février 2014. Université de Franche-Comté/Fort Griffon, 6-7 novembre 2014. 13 mars 2015. et politiques de la réception, Maison de l’Italie - Cité internationale universitaire de Paris, 5 juin 2015. 1-2 octobre 2015/19-20 novembre 2015. |
Liste des événements du programme La critique musicale au XXe siècle dirigé par Timothée Picard à l’Institut universitaire de France (IUF).
RMO_vol.3.1_JE_critique |
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Citation
- Référence papier (pdf)
Margalida Amengual Garí, Hubert Bolduc-Cloutier, Chloé Huvet et Marie-Pier Leduc, « La critique musicale : de la théorie à la pratique. Compte rendu de la journée d’étude, 13 mars 2015, Faculté de musique, Université de Montréal, salle Serge-Garant », Revue musicale OICRM, vol. 3, no 1, 2016, p. 147-159.
- Référence électronique
Margalida Amengual Garí, Hubert Bolduc-Cloutier, Chloé Huvet et Marie-Pier Leduc, « La critique musicale : de la théorie à la pratique. Compte rendu de la journée d’étude, 13 mars 2015, Faculté de musique, Université de Montréal, salle Serge-Garant », Revue musicale OICRM, vol. 3, no 1, mis en ligne le 22 février 2016, https://revuemusicaleoicrm.org/rmo-vol3-n1/je-critique-musicale/, consulté le…
Auteurs
Margalida Amengual Garí, Université de Montréal
Margalida Amengual Garí, originaire de l’île méditerranéenne de Majorque, a suivi une formation en interprétation de guitare classique au Conservatoire de Palma et possède un baccalauréat en journalisme ainsi qu’un baccalauréat en musicologie de l’Université Autonome de Barcelone. Dans la capitale catalane, elle s’est consacrée au journalisme culturel au sein de l’équipe de l’Agence Catalane de Presse pendant trois ans. À son arrivée à Montréal, elle a rejoint les équipes de communication de la Société de musique contemporaine du Québec (SMCQ) et du festival d’art contemporain Art Souterrain. Elle est actuellement étudiante à la maîtrise en musicologie à la Faculté de musique de l’Université de Montréal où elle mène un projet ethnographique sur la réception de la musique du groupe montréalais Arcade Fire sous la direction de Flavia Gervasi. Margalida a intégré l’OICRM en tant que membre du projet sur le Développement des publics de la musique au Québec (DPMQ) où elle est responsable des communications et membre de l’équipe de terrain qui travaille auprès du Théâtre Hector-Charland.
Hubert Bolduc-Cloutier, Université libre de Bruxelles/Université de Montréal
Hubert Bolduc-Cloutier est aspirant chercheur au Fonds national de la recherche scientifique (FNRS) de Belgique. À la suite de l’obtention d’un diplôme de baccalauréat en musicologie à l’Université de Montréal (2011), avec une année complétée à la Karl-Franzens Universität de Graz (Autriche), il a poursuivi son parcours académique en complétant une formation de Master en Histoire, art et archéologie à l’Université libre de Bruxelles (2013). Après une année de stage à titre d’assistant de recherche de la directrice de la section Musique de la Bibliothèque royale de Belgique, Marie Cornaz, Hubert a entamé une formation doctorale en cotutelle entre l’Université Libre de Bruxelles, sous la direction de Valérie Dufour, et l’Université de Montréal, sous la direction de Michel Duchesneau. Ses recherches actuelles portent sur la musique de film dans les années 1930 en France. Hubert est par ailleurs coordonnateur de l’Équipe musique en France aux XXe et XXIe siècles de l’Observatoire international de recherche et création en musique (OICRM).
Chloé Huvet, Université Rennes 2/Université de Montréal
Ancienne élève de l’École Normale Supérieure de Lyon, Chloé Huvet soutient en 2011 un mémoire sur John Williams et obtient son master de recherche en musicologie mention très bien. Elle a publié des articles sur Bruno Coulais, sur la musique d’Eyes Wide Shut (Stanley Kubrick, 1999), de Jurassic Park (Steven Spielberg, 1993), de Vivement Dimanche! (François Truffaut, 1983) et sur les compositions de Trevor Morris pour la série télévisée The Tudors après son intervention au colloque international à l’Université de Nantes en mai 2013. Major de l’agrégation externe de musique en 2012, elle prépare actuellement une thèse sur la musique des deux trilogies de la saga Star Wars créée par George Lucas, sous la direction de Gilles Mouëllic et Michel Duchesneau. Elle est également chargée de cours en analyse de film à l’Université Rennes 2, ainsi qu’en histoire et analyse de la musique de cinéma à l’Université de Montréal.
Marie-Pier Leduc, Université de Montréal
Après avoir complété une maîtrise en musicologie portant sur les concepts d’artisan, de génie et de vedette appliqués aux compositeurs dans la presse musicale française du tournant du XXe siècle (Université de Montréal, 2015), Marie-Pier Leduc a entamé un doctorat sur Émile Vuillermoz et la critique musicale dans la presse littéraire et artistique française entre 1890 et 1940 (cotutelle Université de Montréal et Université libre de Bruxelles) avec le soutien du Fonds de recherche du Québec – Société et culture (FRQSC). Ses recherches se concentrent principalement sur la musique française de la fin du XIXe et de la première moitié du XXe siècle, notamment par l’exploration de la presse de l’époque. Elle œuvre également dans le domaine de l’édition d’ouvrages musicologiques pour les Éditions de la Librairie philosophique J. Vrin et est chargée du cours de Méthodologie en musique à la Faculté de musique de l’Université de Montréal.
Notes
↵1 | Nous pensons aux projets de l’ÉMF de l’OICRM La presse musicale en France (1890-1940). Discours et idéologies et Esthétique musicale en France entre 1900-1950 dirigés par Michel Duchesneau, aux divers projets du Collectif de Recherche sur la Presse Musicale Française de l’Institut de recherche en musicologie (IReMus) et au projet Francophone Music Criticism (1789-1914) dirigé par Barbara L. Kelly et Mark Everist à l’Institute of Musical Research (IMR) de l’Université de Londres. La présente journée d’étude s’inscrivait dans le cadre du programme La critique musicale au XXe siècle dirigé par Timothée Picard à l’Institut universitaire de France (IUF ; voir en annexe la liste des événements organisés dans le cadre de ce programme). |
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↵2 | Parmi les ouvrages récents qui traitent de ces questions de façon panoramique, mentionnons, par exemple : Duchesneau, Dufour et Benoit-Otis 2013 ; Brogniez et Dufour (à paraître) ; Kelly et Moore (à paraître). Pour ce qui est des publications portant sur des figures spécifiques de critiques musicaux, citons l’édition des écrits de Boris de Schlœzer établie et présentée par Timothée Picard (2011) et l’ouvrage d’Emmanuel Reibel (2005) sur la critique musicale d’Hector Berlioz. |
↵3 | Frédéric Hellouin classe d’Udine du côté des « littérateurs – musiciens intuitifs » dans son Essai de critique de la critique musicale (Hellouin 1906, p. 143 et 178-181). Cette étiquette a probablement été renforcée en raison des positions esthétiques du critique. En effet, d’Udine défend les valeurs de simplicité et de clarté, caractéristiques de la musique française qu’il ne retrouve pas chez Debussy. Cela lui a valu de voir ses positions caricaturées par de nombreux debussystes. Reibel insiste au contraire sur les connaissances et les compétences musicales de d’Udine, qui a d’ailleurs composé quelques pièces. |
↵4 | Le terme est employé par d’Udine lui-même (voir d’Udine 1905a et 1905b). |
↵5 | Cette conception de la critique musicale trouvera écho dans les années 1920 avec la fondation de La Revue musicale d’Henry Prunières, comme le remarquera Fernand-Georges Roquebrune (pseudonyme de Georges-Auguste Arbelot) : « L’antique Revue musicale, dirigée autrefois par M. Combarieu, puis par M. Écorcheville, est reprise par M. Henry Prunières, n’en doutons pas, dans le même esprit qui avait présidé à sa fondation : respect des grandes traditions de la critique musicale, prédilection pour les belles recherches musicologiques, pour les patients problèmes de l’histoire de la musique, étude attentive mais prudente des courants nouveaux » (Roquebrune 1920, p. 750-751). Bien que ne revêtant pas la dimension musicographique chère à Rolland et à Dauriac, l’idée de la critique nécessitant une mise à distance temporelle se retrouvera chez des critiques tels qu’Henry Sauveplane qui, à l’instar de nombreux de ses prédécesseurs, regrette que le « jugement [soit] rendu un peu prématurément » (Sauveplane 1937, p. 8). |
↵6 | Fondée en 1899, l’APCDM est issue du Cercle de la critique dramatique et musicale qui avait été formé en 1877. Lorsqu’elle est reconnue légalement en 1902, l’APCDM adopte le nom d’Association syndicale professionnelle et mutuelle de la critique dramatique et musicale (ASPMCDM), bien que souvent simplement appelée Association de la critique dramatique et musicale. En 1960, l’association devient le Syndicat professionnel de la critique dramatique et musicale, puis, en 2002, le Syndicat professionnel de la critique de théâtre, de musique et de danse. L’association existe toujours aujourd’hui, mais sous le nom d’Association professionnelle de la critique théâtre, musique et danse. Sur les premières années de l’APCDM, voir Anglade 1998. |
↵7 | Les 35 quotidiens sélectionnés pour l’enquête ont été consultés dans Gallica, la bibliothèque numérique de la Bibliothèque nationale de France (BnF). |
↵8 | Les archives de l’APCDM se trouvent dans le Fonds Associations et syndicats de journalistes de l’Institut mémoire de l’édition contemporaine (IMEC) à l’abbaye d’Ardenne, Saint-Germain-la-Blanche-Herbe, France. L’Annuaire de l’Association syndicale professionnelle et mutuelle de la critique dramatique et musicale est disponible à la BnF. |
↵9 | Charle propose trois catégories de revue qui prennent leur essor entre 1880 et 1914 : les grandes revues avec, par exemple, la Revue des Deux Mondes, les petites revues dont le Mercure de France est l’un des principaux représentants, et les revues savantes avec comme exemple L’Année sociologique. Cette troisième catégorie est directement liée au développement des disciplines universitaires. |