Hors chant.
Arrangements godardiens pour violoncelle et cordes élargies

Térésa Faucon

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Résumé

Dans les compositions musicales de ses films, Jean-Luc Godard nous fait entendre son écoute d’œuvres musicales, invente des arrangements avec les moyens du cinéma qui pourraient porter une double signature, Beethoven-Godard, Dvořák-Godard, comme les arrangements des musiciens Beethoven-Liszt ou Bach-Webern. Pour cette étude, nous avons choisi de nous concentrer sur les œuvres pour violoncelle, instrument pour lequel Godard semble avoir une prédilection comme pour les cordes frottées en général pour la plasticité de la matière sonore. Nous analysons l’arrangement du Concerto pour violoncelle et orchestre en si mineur, op. 104 d’Antonin Dvořák (1895) dans Je vous salue, Marie (1983) puis la conversation entre deux compositeurs et interprètes, Godard au banc montage et David Darling, avec son violoncelle à huit cordes et les œuvres originales créés pour le cinéaste.

Mots clés : Jean-Luc Godard ; musique et cinéma ; arrangement ; instrument ; violoncelle.

Abstract

In the musical compositions of his films, Jean-Luc Godard invites us to hear how he listens to musical works, invents arrangements with the means of the cinema that could bear a double signature such as Beethoven-Godard, Dvořák-Godard, as the arrangements of the musicians Beethoven-Liszt or Bach-Webern. For this study, we have chosen to focus on works for cello, instrument for which Godard seems to have a predilection as for bowed strings in general for the plasticity of the sound material. We analyze the arrangement of the Concerto for Cello and Orchestra in B minor, op. 104 by Antonin Dvořák (1895) in Je vous salue, Marie (1983), and the conversation between two composers and performers, Godard on the editing bench and David Darling, with his eight-string cello and the original works created for the filmmaker.

Keywords: Jean-Luc Godardmusic and film; arrangement; instrument; cello.

 

Hors chant : il y a dans ce hors l’idée simple du retranchement, de la coupe, de la découpe, d’un instrument dont la voix serait privée de la composition à laquelle elle appartient, du lieu où elle chante et où son chant s’écoule, emporté par le flux du temps musical. Tous les fragments musicaux cités par Jean-Luc Godard sont étrangés1Étranger des images et des sons comme on étrange un gibier en l’éloignant ou en le détournant de sa  ligne d’erre. Je dois le rappel de cet ancien verbe à Philippe Forest (Forest 1998, p. 23) qui l’a lui-même emprunté à Jean-Philippe Miraux (voir Blanchot 1998). de leur chant natal, mais n’en sont pas moins pleinement absorbés par le tissu sonore du film qui les accueille et qui ne connaît pas de hiérarchie entre les voix, les bruits et les notes. Ses films s’écoutent comme des compositions. Si Godard résiste le plus souvent à l’idée d’écoulement, de diffusion de la musique dans le film, il témoigne d’une sensibilité extrême envers ses qualités physiques, sa forme d’onde, la puissance et la finesse d’un timbre, les qualités d’un rythme qu’il saisit comme un peintre retiendrait des formes et des couleurs sans considérer les choses, les objets. Ainsi raccordent la puissance d’un orgue et le cri d’une corneille. Ainsi se superposent le crissement des pneus d’une voiture sur la chaussée et un glissando de David Darling au violoncelle.

 

Découper/analyser

L’écoute de Godard ne nous donne presque toujours que des musiques sans cesse interrompues. Elle peut paraître impatiente, impertinente, désobéissante, peut-être parce que l’écoute a toujours rapport avec l’obéissance (Szendy 2011, p. 17-18). L’écoute de ses films « demeure dans cette béance, dans cette fragmentation sans rassemblement possible » (Mallet 2002, p. 152), même éperdument attentive. Au cinéma, cela devrait être une prescription. Le spectateur est avant tout un voyeur plus qu’un auditeur, son écoute a trop souvent été enchaînée à l’image, limitée, bornée par ses repères spatiaux et temporels, pour que la possibilité d’une écoute plus autonome ne puisse se faire que par un geste violent, la coupe. Il faut « déblayer, débarrasser ce qui s’entrepose, mettre en échec et écarter les habitudes d’écoute, les catégories d’écoute qui prédominent à l’intérieur de la société » (Lachenmann 2000, p. 119). Pour Godard, écouter de la musique dans un film n’est possible que si « notre écoute est désarmée par sa déchirure » (Lachenmann 2000, p. 118). Ces éclats sonores sont comme « des éclats de pierre sous les gestes du tailleur » (Arcila 2007), tailleur que Yann Paranthoën, auteur de documentaires radiophoniques, comparait ici au monteur.

Réhabiliter l’écoute en la désarmant, n’est-ce pas aussi l’occasion de remettre en cause la confiance que nous avons dans nos yeux, d’en perturber le réflexe de captation, pour « se laisser surprendre par ce qui arrive, surgit comme si l’on avait plus la possibilité de le voir venir » (Mallet 2002, p. 50). Paul Claudel déclare, dans L’Œil écoute : « La vue est l’organe de l’approbation active, de la conquête intellectuelle, tandis que l’ouïe est celui de la réceptivité » (Claudel 1946, p. 76). Cet œil qui écoute ne ramène pas l’écoute à la vue. Il ne s’agit pas de voir avec l’oreille comme certaines recherches synesthésiques des années 1920 l’ont tenté jusqu’au synchronisme parfait – ainsi d’Oskar Fischinger dans Studie no 7 soumettant le jeu des formes abstraites au tempo de la cinquième danse hongroise de Brahms ou plus tard Fantasia dont Disney disait : « Vous pourrez voir la musique et entendre l’image » (Culhane 1999, p. 36). Il s’agit au contraire de redonner à la vue « la fragilité, l’attention éperdue de l’écoute » (Mallet 2002, p. 49). Chez Godard, cette fragilité de la vue n’est sans doute pas sans rapport avec sa myopie. Une de ses directrices de la photographie, Caroline Champetier, a fait remarquer à quel point cette affection fonde son cinéma. Voir flou, c’est sans doute voir autrement, avec cette fragilité où les choses comme les sons semblent toujours « surgir, comme par effraction, sans lieu propre, peu situables, voire insituables, toujours imprévisibles » (Mallet 2002, p. 50). Cette fragilité de l’œil qui ne saisit pas ou se dessaisit sans cesse de ce qu’il capte est aussi lié au fait que, pour Godard, faire un plan c’est « cadrer et non encadrer » (selon un jeu de mot qu’il utilise souvent). Et il cadre souvent la lumière c’est-à-dire ce mouvement de l’éphémère, la fugacité d’une onde, un flux aussi impalpable et insaisissable qu’un son, quelque chose qui échappe à l’œil, lui qui aime tant garder – dans regarder il y a garder et même « garder deux fois » comme le dit le mari d’Une femme mariée2Pour prolonger la réflexion sur re-garder, voir aussi Mallet 2000, p. 50 et Nancy 2001, p. 39.. Voir et interpréter sont indissociables tout comme écouter et interpréter (Mallet dans Szendy 2000, p. 206).

Écouter/interpréter

Cette équivalence, Roland Barthes l’a définie par un autre verbe : jouer.

Il fut une époque où, les amateurs actifs étant nombreux (du moins à l’intérieur d’une certaine classe), « jouer » et « écouter » constituaient une activité peu différenciée ; puis deux rôles sont successivement apparus : d’abord celui de l’interprète, auquel le public bourgeois (bien qu’il sût encore lui-même jouer quelque peu : c’est toute l’histoire du piano) déléguait son jeu ; puis celui de l’amateur (passif), qui écoute de la musique sans savoir en jouer (au piano a effectivement succédé le disque) ; on sait qu’aujourd’hui la musique post-sérielle a bouleversé le rôle de l’« interprète », à qui il est demandé d’être en quelque sorte le co-auteur de la partition qu’il complète, plus qu’il ne l’« exprime » (Barthes [1971]2002, p. 914-915).

Cette analogie permettait à Barthes de conclure que « le Texte est à peu près une partition de ce nouveau genre : il sollicite du lecteur une collaboration pratique » (ibid). De même, le cinéaste qui cite des œuvres musicales est avant tout un interprète. Comment définir ce geste ? Quel est l’instrument de son interprétation ? Interpréter est une forme d’analyse qui passe chez Godard par la découpe. Jacques Aumont l’a déjà longuement commenté :

Déchirer le tissu musical, ce n’est pas seulement en produire des lambeaux mais éventuellement en mettre à jour la trame. Telle est la leçon essentielle du bon usage filmique des quatuors de Beethoven. La coupe, si inattendue soit elle, ne démembre pas, elle analyse (Aumont 1996, p. 269).

La lacération des quatuors de Beethoven dans les années 1960, et encore dans Prénom Carmen (1983), est par exemple une façon de faire entendre. Comme l’analysait Éric Rohmer :

Il n’y a pas de note inattendue (par exemple une altération du ton par un dièse, un bémol ou un bécarre où le compositeur joue avec l’attente de l’auditeur) pour la bonne et simple raison qu’il n’y a pas de note attendue non plus. Il ne travaille jamais contre les clichés. Quand il innove c’est du tout au tout. C’est pourquoi il déconcerte tant au premier abord, car on manque de points de repère (Rohmer 1996, p. 249).

L’analyse ne porte pas seulement sur la composition mais nous « invite à goûter la pure qualité de l’impression sonore – sa précieuse couleur – qui existe bien sûr dans les raffinements du timbre et de l’harmonie » (ibid.). C’est aussi pour en garder le tremblement vibratoire.

Arranger

La musique dans un film est impossible à moins de « devenir figure » (ibid.), c’est-à-dire de faire preuve d’une certaine voire d’une grande élasticité. Devenir figure correspond pour Godard à l’épiphanie de la matière sonore en métamorphose, une matière musicale étendue aux bruits et aux voix du monde. La musique n’est donc possible que composée par le cinéma et non pour, c’est-à-dire interprétée par le matériau cinématographique ou transposée par les instruments cinématographiques. Ce geste peut être nommé plus précisément arrangement. Selon la définition proposée par l’Encyclopédie de la musique de Fasquelles (1958), on appelle arrangement la « transformation d’un texte pour en rendre possible l’exécution à une autre catégorie d’instruments que ceux à l’usage desquels il avait été écrit […]. On appelle arrangement le travail savant et de haut style semblable à celui que fit Bach (Szendy 2011, p. 53). Commentant et complétant cette définition, Peter Szendy ajoute que les arrangeurs

signent dans l’œuvre en n’hésitant pas à apposer leur nom à côté de celui de l’auteur. En lui accolant carrément leur patronyme par un trait d’union : par exemple Beethoven-Liszt (pour une version pianistique des neuf symphonies), Bach-Webern (pour une orchestration du ricercar de L’Offrande musicale), ou encore Brahms-Schoenberg, Schubert-Berio, bref toute une foule de signatures bifides (ibid.).

Au premier abord, Godard, aurait bien du mal à cosigner avec tous les artistes qu’il cite, y compris les musiciens. Toutefois, on peut distinguer l’arrangeur du ferrailleur en reconnaissant la possibilité de deux ou trois signatures bifides : Beethoven-Godard, Ravel-Godard, Dvořák-Godard, Darling-Godard3La première a déjà été commentée, comme je l’ai rappelé, au moins par Rohmer et Aumont, tandis que je me suis attardée sur la seconde dans l’analyse du début de Passion (Faucon 2007, p. 51-63).. Ce que l’arrangeur Godard signe, pour reprendre les termes de Peter Szendy, « c’est avant tout une écoute, son écoute d’une œuvre. Les arrangeurs sont peut-être les seuls auditeurs de l’histoire de la musique à écrire leurs écoutes, plutôt que de les décrire (comme le font les critiques) » (ibid.). Godard est sans aucun doute un des rares cinéastes à avoir monté ses écoutes. Écouter un film de Godard c’est « l’entendre entendre » :

La force propre à tout arrangement c’est que nous entendons double : dans cette écoute oscillante, bifide, dans cette écoute qui se laisse creuser par l’écart sans cesse traversé entre la version d’origine et sa déformation, ce que j’entends, c’est en quelque sorte que l’originalité de l’original reçoit son lieu propre depuis sa mise à l’épreuve plastique (ibid., p. 54).

 

Dvořák-Godard

Des fragments du Concerto pour violoncelle et orchestre en si mineur, op. 104 d’Antonin Dvořák (1895) surgissent et ponctuent régulièrement le tissu sonore de Je vous salue, Marie (1984), suffisamment pour qu’une oreille habituée à cette œuvre entende courir la cavalcade de l’orchestre ou celle de l’instrument soliste qui l’apostrophe même quand la musique s’efface. Entraîné par l’élan du morceau, le mélomane se surprend d’ailleurs à siffler les mesures manquantes jusqu’au retour de la musique. Contrairement aux habitudes de lacération musicale de Godard, ici le Concerto s’élève crescendo et disparaît tout aussi progressivement. Les moments prélevés semblent parfois moins précis qu’à l’habitude – l’attaque d’une note ou d’un accord étant émoussée – mais invitent à entendre une conversation entre l’œuvre musicale et le film, entre leurs scénarios mêmes. Le premier mouvement musical est souvent commenté comme une lutte, un affrontement de tout l’orchestre et du soliste. Cependant, la reprise des thèmes par l’un et l’autre annonce la possibilité d’une réconciliation, de l’harmonie résolvant la tension du contrepoint. Le film, lui, isole Marie des autres personnages, ou la confronte à Gabriel ou à Joseph. L’impression se renforce que le Concerto se déroulerait parallèlement au film, ou sous le film, affleurant, disparaissant puis revenant d’une simple poussée de la tirette (fader). Quand Gabriel arrive au garage pour venir chercher Marie, la montée de l’orchestre est interrompue un bref instant par le crissement des pneus de sa voiture et reprend. L’identification de l’interprétation choisie par Godard (le générique ne mentionnant que le nom du compositeur) permettrait de confirmer l’intuition en écoutant simultanément le film et l’enregistrement. Mais je ne peux que formuler des hypothèses après m’être prêtée à l’exercice avec trois interprétations du Concerto dans un tempo particulièrement enlevé (Mstislav Rostropovich, Janos Starker, Pablo Casals), synchronisées avec le film sur l’entrée du violoncelle. Parmi les enregistrements disponibles au milieu des années 1980 que j’ai pu écouter, je pencherais pour l’une des versions de Starker qui, contrairement à Rostropovich (dans trois versions écoutées) ou encore Pierre Fournier, attaque, comme dans le film, en staccato – et non legato – l’entrée impétueuse du violoncelle4J’ai mis de côté Pablo Casals pour la qualité des enregistrements qui le rendrait facilement identifiable..

Attaquer

J’y reconnais ce goût pour l’attaque instrumentale que scénarise le concerto en créant un effet d’attente pendant plus de trois minutes et l’exposition des deux thèmes principaux par l’orchestre. C’est cette attaque que Godard venait de mettre en scène dans Prénom Carmen avec l’analogie, déjà soulignée par Aumont, entre les répétitions du quatuor Prat travaillant l’attaque de l’archet sur les cordes et l’attaque de la banque (Aumont 1996, p. 269). Ici l’attaque du violoncelle correspond à l’appel et à l’identification de Marie. Chaque insertion d’un fragment musical dans le tissu sonore du film rejoue ce geste propre à l’interprétation instrumentale. L’attaque est aussi une signature. C’est justement en écoutant l’entrée du violoncelle dans Je vous salue, Marie que j’ai fait l’hypothèse de Starker après reconnaissance de la pression exercée sur les cordes, de l’écrasement des crins qui donne à la vibration un toucher personnel plus ou moins gras ou sec, léger ou lourd.

Chaque déchirure du tissu musical nous sensibilise à la matière sonore, « fait entrer dans la profondeur de la musique, dans la profondeur de l’écoute » (Aumont 1996, p. 271), que les poussées musicales interrompent l’élan mélodique ou insistent sur la répétition de motifs et l’accordage entre l’orchestre et le soliste. L’avion qui décolle semble soulevé par la montée orchestrale du premier mouvement, et son vrombissement redouble le crescendo des instruments. L’objet sonore « crissement des pneus », déjà signalé, revêt aussi une proximité évidente avec les cordes frottées des violons s’envolant vers les aigus.

Le Concerto intervient de façon insistante à deux moments précis de l’histoire de Marie : l’Annonciation jusqu’à la répudiation par Joseph et la réconciliation dans la chambre. Le premier mouvement allegro du Concerto suit la trame de l’Annonciation dans le film, prédit l’imminence d’une rencontre. L’ouverture orchestrale est fragmentée sur le parcours de Gabriel, de l’aéroport au garage du père de Marie. Le soulèvement de l’orchestre et l’arc mélodique de la première phrase ont la puissance et la trajectoire de l’avion qui décolle et emporte Gabriel, et que Marie semble déjà entendre/voir tandis qu’elle se coiffe devant le miroir. L’Annonciation est modulée en attente. Au moment de la rencontre, contrairement au Concerto pour la main gauche de Ravel, que Godard a arrangé dans Passion (1982) où le soliste apostrophe la puissance de l’orchestre, dont le crescendo est aussi associé au vol d’un avion et lui impose le silence contre toute attente, ici, après l’exposition des deux thèmes en mi bémol et  majeur, le corps orchestral semble se déliter. Cor et bassons n’égrènent plus que quelques notes jusqu’à un accord à l’unisson, qui laisse toute la place au soliste pour son entrée flamboyante reprenant le premier thème. Entre l’appel de l’orchestre et la réplique du violoncelle, un intervalle, un accord tenu. L’intervalle a par ailleurs été très commenté dans la représentation de l’Annonciation comme lieu de suspension, de tension, suture dans un espace ambigu, puisque s’y joue une « véritable concrétion du temps sacré, […] nœud de plusieurs temps éloignés dans l’histoire ou même disjoints dans l’ordre ontologique » (Didi-Huberman 1990, p. 128-130). L’étonnement de Marie au passage de l’avion semble déjà jouer celui du moment de son arrivée. Ce moment de tension entre deux éléments contrastés évoque aussi les oxymores du sermon de saint Bernardin, De triplici Christi nativitate, cité par Daniel Arasse dans son essai consacré à L’Annonciation italienne :

L’Incarnation est le moment où l’éternité vient dans le temps, l’immensité dans la mesure, le Créateur dans la créature, Dieu dans l’homme, la vie dans la mort, […] l’incorruptible dans le corruptible, l’infigurable dans la figure, l’inénarrable dans le discours, l’inexplicable dans la parole, l’incirconscriptible dans le lieu, l’invisible dans la vision, […], l’impalpable dans le tangible, le contenant dans le contenu. L’artisan entre dans son œuvre, la longueur dans la brièveté, la largeur dans l’étroitesse… (Saint-Bernardin dans Arasse 1999, p. 11-12).

Le montage de l’arrivée de Gabriel insiste sur cette tension entre les plans devant la station essence où s’entretiennent Gabriel, le père et la sœur de Marie, et l’insert sur le visage de Marie. Ce plan correspond à l’entrée du violoncelle qui, tout en identifiant Marie par le contrepoint des voix la nommant et de son visage apparaissant, est tout à fait isolé puisque son regard vers le hors-champ ne simule pas un regard perçant les murs et répondant à l’appel de son nom. Il joue plus l’étonnement à la surprise de l’entrée du violoncelle. Un œil qui écoute, subjugué par cet effet de surgissement dans un espace musical sans horizon. Ce regard vers un espace autre mettant en scène l’écoute déclenche aussi celle du spectateur et le remobilise à chaque sortie ou entrée de l’instrument. Ce même regard est répété une troisième fois dans la séquence de la chambre avec Joseph. Marie vient s’asseoir à côté de lui sur le lit et regarde dans la même direction, comme si la musique passait hors champ. Cette fois c’est le thème mélancolique du violoncelle qui reprend celui déjà exposé par l’orchestre, et cette répétition dit bien l’accordage qui résout l’affrontement initial. Autre interprétation possible de ce regard hors champ et de la virtualité de l’échange de l’Annonciation : l’insert sur Marie et l’entrée du violoncelle pourraient figurer l’Annonciation par le contrepoint quand le Verbe s’incarne dans la voix du violoncelle traversant le visage de Marie, la touchant, la pénétrant. Alors, la séquence de la chambre, où le concerto revient avec le second thème plus apaisé, rejoue ce toucher par un geste de Joseph : il pose sa main sur le ventre de Marie, tandis que le violoncelle semble avoir trouvé son lieu de résonance.

Corps du violoncelle

Avec cette séquence, « comme un coup d’archet sur la mémoire » (Gracq [1980]1995, p. 666), il m’a semblé comprendre pourquoi Godard avait choisi cet instrument pour l’histoire de Marie. Il explore un autre rapport entre personnage/corps d’actrice et instrument. Après une Myriem Roussel violoniste dans Prénom Carmen, le personnage de Marie, composé d’un double musical, le violoncelle, entre dans une fiction organologique. Que cet instrument accompagne ce destin de femme qui passe brutalement de la virginité à la maternité tient sans doute à ce que représente cet instrument : il est absolument féminin. Sa caisse harmonique a une morphologie qui correspond à un canon de beauté (taille fine d’où s’ouvre l’éventail des hanches), et mesure depuis Stradivarius 75 cm, ce qui de la tête à la pique déployée donne environ un mètre cinquante. Sa tessiture est très proche de celle de la voix humaine. Le violoncelle serait donc le double féminin de Marie et plus précisément son devenir femme, devenir mère. Tenir un violoncelle contre soi c’est créer une zone de vibration entre son corps et l’instrument qui pourrait correspondre au volume d’un enfant que l’on porte. Le corps du violoncelliste est dilaté par ce « membre fantôme »5J’emprunte cette expression à Szendy 2002. qui modifie son centre de gravité et dont son corps peut très précisément garder la mémoire.

L’instrument est par ailleurs très présent dans Je vous salue, Marie (1985). Outre le tissage des fragments de Dvořák, la séquence du générique met en exergue du film l’andante de la première Sonate en sol majeur (BMW 1027) pour violoncelle et clavecin de Bach. Dans le maillage des citations du Concerto de Dvořák, Godard insère aussi les premières mesures de l’adagio du Concerto pour violon en mi majeur (BWM 1042), retenant la ritournelle des violoncelles qui a par ailleurs des airs vivaldiens. Ces éclats de violoncelle traversent l’histoire de l’instrument et font émerger des influences souterraines ou connues des compositeurs, de Vivaldi à Bach et Dvořák, qui ont marqué le répertoire notamment en libérant le violoncelle de son rôle de basse continue. À ce moment, le double nom Bach-Dvořák inscrit au générique de fin prend aussi un sens : le trait d’union résume cette dualité dans l’espace de l’Annonciation très codifié par la peinture, séparation entre profane et sacré que Godard n’a cessé de brouiller dans le film. Si l’on aurait pu spontanément penser que Bach serait associé au sacré et Dvořák au profane, le violoncelle soliste accompagne l’Annonciation tandis que Bach rythme les tâches ménagères répétitives – Marie repasse sur l’adagio du Concerto pour violon – ou ses tout derniers gestes : sur une cantate, Marie se met du rouge à lèvres et ouvre la bouche vers la caméra pour clore le film. Ici, l’arrangement musical à l’échelle du film confronte, monte deux pièces du répertoire du violoncelle, travaille l’articulation sacré/profane comme un changement d’idée plutôt que comme une rupture.

(Ac)corder

À partir du milieu des années 1980, l’arrangement godardien s’intéresse encore plus à la matière sonore qu’à la forme musicale, à son élasticité. Avec une prédilection pour les instruments à cordes frottées, il opère alors par glissements, résonances, transmutations vibratoires plutôt que par coupes. Si les quatuors pour cordes de Beethoven ont été largement cités et lacérés dans les années 1960, les répétitions du quatuor Prat dans Prénom Carmen nous apprennent de cette compositions musicale qu’elle est une matière sonore avant que l’histoire de la musique récente ne mette sa plasticité au premier plan. Les cadrages découpant les instrumentistes inventent un corps musical hybride propre au quatuor à cordes, où les instruments échangent ou inversent leur rôle puisque leurs voix et couleurs se recouvrent partiellement. Comme l’a souligné Bernard Fournier

ce qui caractérise le quatuor à cordes, c’est essentiellement son homogénéité tant du point de vue de la sonorité que de la technique instrumentale et des modes de jeu. Lorsque les quatre instruments sont unis dans un même geste, comme dans l’enchaînement de ces longs accords du Maestoso qui ouvre l’opus 127 de Beethoven, le quatuor témoigne d’une sonorité rayonnante qu’il est le seul genre instrumental à pouvoir offrir ainsi avec une telle plénitude.
Si une telle homogénéité ouvre au compositeur des possibilités sonores et expressives qu’il ne trouve pas avec des instrumentaux hétérogènes, la personnalisation des quatre voix lui permet à l’inverse de simuler l’hétérogénéité, contrairement à un instrument seul comme le piano où toutes les rênes du discours sont tenues par la même main. Le quatuor n’induit pas, comme le piano, un genre « fusionné » – il n’est pas vraiment un instrument à seize cordes –, mais un genre fusionnel, c’est-à-dire portant en lui des possibilités de fusion mais aussi de dissociation (Fournier 2000, p. 16).

Citons, concernant ces effets de dissociation, un plan sur l’altiste composé en contrepoint avec le bras du violoncelliste occupant le premier plan de ses mouvements d’archet ascendant et descendant, comme un point d’ancrage dans l’image pour mieux entendre la basse harmonique par rapport au chant de l’altiste. Ajoutons que c’est aussi le quatuor à cordes qui a permis au violoncelle de s’émanciper rapidement du rôle de basse continue auquel il était cantonné à ses débuts. Ici, chaque instrument se déploie dans son registre propre mais avec des possibilités d’antagonisme comme de fusion. Le violoncelle a d’ailleurs pris une place singulière dans les films de Godard depuis la rencontre et la conversation avec David Darling en particulier, et depuis la découverte du paysage musical du label ECM en général (avec Guia Kanchelli, Ketil Bjørnstad, Arvo Pärt, Heinz Holliger, Paul Hindeminth, György Kurtág, Meredith Monk)6Rencontre provoquée par Manfred Eicher, fondateur et producteur d’ECM, qui envoya des disques à Godard. « Je les ai écoutés, puis je lui ai demandé de m’en envoyer d’autres. Sa façon de produire la musique me donnait l’impression que nous étions plus ou moins dans le même pays : lui avec ses sons, moi avec mes images. Et les musiques qu’il m’envoie me donnent des idées pour mes films. En fait, certains de ses disques m’ont inspiré un film qui s’appelle Nouvelle Vague et plus tard d’autres… (Hélas pour moi par exemple) Souvent les sons nous ont donné la sensation d’être orphelins d’images, ou exilés d’un pays d’images… c’était comme si on … Continue reading. Avec Nouvelle Vague (1990), une nouvelle signature bifide apparaît dans les films de Godard : Darling-Godard. Les échanges entre les deux artistes invitent aussi à la lire dans l’autre sens : Godard-Darling.

 

Godard-Darling

Par son goût pour les mélanges hétérogènes et pour les expérimentations, le compositeur-instrumentiste est presque un alter ego du cinéaste. Dans le même concert en tant que soliste, il peut interpréter au violoncelle Bach, du blues, de la musique brésilienne, africaine, indienne ou encore une lente méditation vibratoire avec son violoncelle électrique. Lors de sa participation au Paul Winter Consort en 1969, il ajoutait aussi des voix d’animaux, comme Godard qui ponctue régulièrement ses films de croassements de corbeaux et d’aboiements de chien. L’un comme l’autre sont sensibles au tremblement vibratoire du tissu sonore du monde. Darling a aussi composé, en collaboration avec Manfred Eicher, des pièces pour Godard telles No Place Nowhere et Two or Three Things (1991 et 1992). Dans celles-ci, le potentiel augmenté du violoncelle électrique à huit cordes de Darling semble répondre à l’écoute godardienne qui transparaît dans ses arrangements filmiques, écoute où la vibration, la résonance et la matière sonore l’emportent sur le motif ou la phrase musicale. Dans Two or Three Things, il y a quelque chose de l’ordre de l’accordage, d’une recherche de l’équilibre des sons qui s’appelleraient mutuellement comme dans la pièce de Kurtág (Ligatura-Message to Frances-Marie. The Answered-Unanswered Question, op. 31b) qui peut se jouer à un violoncelle et deux archets, ou deux violoncelles presqu’ensemble, très légèrement déphasés.

Dans Nouvelle Vague, l’écoute des jeux de fusion des quatuors de Beethoven se retrouve encore intensifiée dans le sextuor de Schoenberg, La nuit transfigurée (1899), que Godard cite à trois reprises au moins, ou dans Trauermusik pour soliste (alto, violoncelle ou violon) et cordes de Paul Hindemith (1936). Dans ces choix s’exprime une sensibilité extrême à la tension, au frottement (tension des cordes, frottement de l’archet) et à la vibration, c’est-à-dire à la puissance des jeux de réverbérations ou d’échos dans le mixage ou l’utilisation d’instruments électriques. L’édition sur disque de Nouvelle Vague invite à écouter ce tremblement vibratoire de la composition à partir d’œuvres diverses pour cordes, orgues et accordéon en donnant l’impression d’une même famille d’instruments, ou d’un instrument à la palette étendue comme déjà les huit cordes du violoncelle de Darling ou la voix dédoublée à une octave de différence entre alto et violoncelle qui ont les mêmes cordes, do, sol, , la. La dynamique d’une note déployée par le soufflet de l’accordéon est étrangement voisine de celle d’un long coup d’archet. Ou encore : le mécanisme de résonance de l’orgue semble imité par le violoncelle électrique. Entre tous les instruments, un son se présente comme la transformation d’un autre – ce que le toucher d’un interprète par son vibrato peut résumer. On entend ainsi par exemple successivement deux extraits de Darling pour violoncelle seul, des fragments de Dino Saluzzi à l’accordéon, le retour du violoncelle dans lequel se fond une voix, l’accordéon à nouveau, violoncelle et voix, violoncelle seul (Trema de Heinz Holliger, 1981), un extrait de la Messe en do de Werner Pirchner à l’orgue, puis uniquement des œuvres pour cordes, deux sonates de Hindemith pour violon et pour alto, et deux pièces de musique de chambre où l’on retrouve réunis violon, violoncelle et alto : La nuit transfigurée de Schoenberg et Trauermusik d’Hindemith. Ici encore, on peut parler d’arrangement, de mise à l’épreuve plastique d’œuvres musicales rassemblées dans un label que Godard explore comme un paysage musical, et pas seulement d’un mixage d’œuvres hétérogènes.

Arranger c’est envisager cette possibilité pour une autre catégorie d’instruments d’exécuter une pièce musicale. Or, l’instrument du cinéma est sans doute la table de montage qui coupe, fragmente, rassemble, juxtapose, répète, échantillonne, puis celle du mixage, et il faudrait préciser qu’il s’agit moins de la table de montage cinématographique qui décompose les opérations (image, son) que d’un banc de montage vidéo (qui rassemble tous les éléments pour une manipulation conjointe facilitée)7Ce passage de la table de montage au mélange d’images et de sons du banc vidéo rappelle la mutation du montage au mixage, selon la déclaration de Godard : « Mais il faut mixer, maintenant ; c’est pas monter qu’il faut, c’est mixer » (Godard dans Bergala, Daney et Toubiana 1982, p. 12).. Godard lui-même, dans un entretien avec Jonathan Rosenbaum au festival de Locarno au moment de l’édition des Histoire(s) du cinéma, affirmait que

la vidéo est plus proche de la peinture ou de la musique. Vous travaillez avec vos mains comme un musicien avec un instrument, et vous en jouer. Dans un film, vous ne pouvez pas dire que la caméra est l’instrument avec lequel vous interprétez, c’est différent8Voir https://www.jonathanrosenbaum.net/1997/04/trailer-for-godard’s-histoires-du-cinema/, consulté le 15 février 2018..

On parlera alors d’interprétation musicale avec un instrument élargi et dématérialisé, Godard ayant dépassé « l’immobilisation du corpus instrumental » (Boulez) et comme suivi l’évolution de la facture des instruments. En effet, depuis plusieurs années déjà

ce qui était une persistance d’un monde ancien – l’instrument de musique – semble menacé dans ses fondements, précisément par ce procès d’atomisation, de parcellisation, de réaménagement programmé des fonctions et des tâches. Dans un tel contexte, la production sonore devient l’affaire d’une ingénierie électroacoustique (Dufourt dans Szendy 1995, p. 62).

Si Godard repart d’enregistrement d’instruments physiques, ses gestes, proches de celui d’un acousticien, explorant le tremblement vibratoire et la résonance de cette matière sonore, évoquent cette dématérialisation (Battier dans ibid., p. 43-56). « L’invention, l’innovation instrumentale commencerait donc non pas par le travail du matériau mais par une activité “symbolique” aux prises avec un environnement logiciel, avec un simulacre d’instrument » (Szendy 2000, p. 12) Mais dans cette mécanisation instrumentale, de la lutherie électronique au banc de montage, on ne peut se passer de l’interprète. L’instrument est comme une extension de l’homme à moins que ce dernier ne fonctionne comme son instrument selon la remarque de Diderot expliquant, dans l’entretien avec d’Alembert, « ce qui l’a fait quelque fois comparer les fibres de nos organes à des cordes vibrantes sensibles » (Diderot dans Szendy 2002, p. 23) et décrivant « tout ce qui se passe dans un clavecin organisé comme vous et moi » (Diderot [1769]2008, p. 50).

La corde vibrante sensible oscille, résonne longtemps encore après qu’on l’a pincée. C’est cette oscillation, cette espèce de résonnance nécessaire qui tient l’objet présent, tandis que l’entendement s’occupe de la qualité qui lui convient. Mais les cordes vibrantes ont encore une autre propriété, c’est d’en faire frémir d’autres ; et c’est ainsi qu’une première idée en rappelle une seconde, ces deux-là une troisième, toutes les trois une quatrième, et ainsi de suite, sans qu’on puisse fixer la limite des idées réveillées, enchaînées, du philosophe qui médite ou qui s’écoute dans le silence et l’obscurité (Diderot dans Szendy 2002, p. 23).

Pour conclure sur cette dématérialisation ou intégration de l’instrument au corps de l’interprète, je prendrai un dernier exemple, loin de Godard mais proche du violoncelle : Babilée 91 (William Klein, 1992). Maurice Baquet, violoncelliste humoriste, y arrange librement les Suites de Bach, en sautant d’une phrase à l’autre, tandis que Jean Babilée danse autour de lui. Le danseur mime les mouvements du musicien, le corps à corps avec l’instrument, le corps contre-corps avec pour intermédiaire le corps étranger de l’archet. Il rejoue l’attaque de l’archet, son amplitude, ses tressautements, ou dessine d’une arabesque ses legatos. Si bien que, du jeu musical, on retient une empreinte cinétique vibrant d’un corps à l’autre9Ce que la mise en scène et chorégraphie d’Anne Teresa de Keersmaeker pour Cosi fan tutte (2017) a exploré avec beaucoup d’assiduité.. La danse nous apprend ici, comme le cinéma de l’arrangeur Godard, que cette écoute essentiellement vibratoire de la musique est performative et trouve à s’actualiser dans la dynamique spatiale et la résonance visuelle : le chorégraphique.

 

Bibliographie

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PDF

RMO_vol.5.1_Faucon

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Citation

  • Référence papier (pdf)

Térésa Faucon, « Hors chant. Arrangements godardiens pour violoncelle et cordes élargies », Revue musicale OICRM, vol. 5, no 1, 2018, p. 33-45.

  • Référence électronique

Térésa Faucon, « Hors chant. Arrangements godardiens pour violoncelle et cordes élargies », Revue musicale OICRM, vol. 5, no 1, mis en ligne le 16 mars 2018, https://revuemusicaleoicrm.org/vol5-n1-godard/, consulté le…


Auteur

Térésa Faucon, Université Sorbonne-Nouvelle Paris 3

Térésa Faucon est Maître de conférences HDR à l’Université Sorbonne-Nouvelle Paris 3 depuis 2007. Ses recherches portent sur l’esthétique et la théorie du cinéma et des images contemporaines, l’histoire des formes (entre autres, le montage), les rapports danse/cinéma et les cinémas indiens. Publication d’articles dans les revues Art Press, Quotidien de l’art, Vertigo, Cinémathèque, Cinéma, 1895. Publication d’ouvrages : JMW Turner (coécrit avec Damien Sausset Flammarion, 2004) ; Penser et expérimenter le montage (PSN, 2009) ; Théorie du montage. Energie, forces, fluides (Armand Colin, 2013, 2ème édition 2017) ; Gestes contemporains du montage. Entre médium et performance (Naima, 2017).

Notes

Notes
1 Étranger des images et des sons comme on étrange un gibier en l’éloignant ou en le détournant de sa  ligne d’erre. Je dois le rappel de cet ancien verbe à Philippe Forest (Forest 1998, p. 23) qui l’a lui-même emprunté à Jean-Philippe Miraux (voir Blanchot 1998).
2 Pour prolonger la réflexion sur re-garder, voir aussi Mallet 2000, p. 50 et Nancy 2001, p. 39.
3 La première a déjà été commentée, comme je l’ai rappelé, au moins par Rohmer et Aumont, tandis que je me suis attardée sur la seconde dans l’analyse du début de Passion (Faucon 2007, p. 51-63).
4 J’ai mis de côté Pablo Casals pour la qualité des enregistrements qui le rendrait facilement identifiable.
5 J’emprunte cette expression à Szendy 2002.
6 Rencontre provoquée par Manfred Eicher, fondateur et producteur d’ECM, qui envoya des disques à Godard. « Je les ai écoutés, puis je lui ai demandé de m’en envoyer d’autres. Sa façon de produire la musique me donnait l’impression que nous étions plus ou moins dans le même pays : lui avec ses sons, moi avec mes images. Et les musiques qu’il m’envoie me donnent des idées pour mes films. En fait, certains de ses disques m’ont inspiré un film qui s’appelle Nouvelle Vague et plus tard d’autres… (Hélas pour moi par exemple) Souvent les sons nous ont donné la sensation d’être orphelins d’images, ou exilés d’un pays d’images… c’était comme si on entendait la musique de films qui n’existaient pas. Et je me suis mis à imaginer des choses à cause de ce type de musique » (Dossier de presse, éditions CD Histoire(s) du cinéma, ECM, 1998).
7 Ce passage de la table de montage au mélange d’images et de sons du banc vidéo rappelle la mutation du montage au mixage, selon la déclaration de Godard : « Mais il faut mixer, maintenant ; c’est pas monter qu’il faut, c’est mixer » (Godard dans Bergala, Daney et Toubiana 1982, p. 12).
8 Voir https://www.jonathanrosenbaum.net/1997/04/trailer-for-godard’s-histoires-du-cinema/, consulté le 15 février 2018.
9 Ce que la mise en scène et chorégraphie d’Anne Teresa de Keersmaeker pour Cosi fan tutte (2017) a exploré avec beaucoup d’assiduité.

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